Tenant du titre et en tête après le programme court, Adam Siao Him Fa était le favori. Et il a assumé son statut. Le Français a été sacré champion d'Europe pour la deuxième fois vendredi soir, à Kaunas (Lituanie). Avec un total de 276,17 points, il devance de près de vingt points son dauphin, le surprenant Estonien Aleksandr Selevko (256,99 pts). Le podium est complété par l'Italien Matteo Rizzo, 2e l'an dernier, mais qui s'est avancé diminué par une blessure à la hanche.
Évidemment, les esprits chagrins noteront que le Français de 22 ans a commis quelques erreurs, et notamment une chute sur son quadruple boucle piqué, le deuxième de ses quatre quads au menu. Mais il a été capable de replacer la combinaison sur son second quad piqué, preuve que le garçon a progressé mentalement, qu'il est capable de se remobiliser.
Et puis, surtout, il s'est autorisé à ponctuer sa sublime chorégraphie sur des musiques de Max Richter par un backflip. Un élément interdit et sanctionné par deux points de pénalité. Mais l'avance d'Adam Siao Him Fa est telle en Europe qu'il s'agissait d'un risque calculé. « On est arrivé en étant conscient qu'il avait une marge conséquente, confirme Cédric Tour, l'un de ses entraîneurs. On attendait presque plus la performance que le résultat. La performance n'est pas encore au rendez-vous, mais il y a un gros progrès par rapport à l'année dernière. » Et ce n'est pas fini.
Le Niçois d'adoption a profité de son début de saison étourdissant pour battre au moins une fois tous les meilleurs spécialistes de la planète. On salive donc déjà à l'idée des Mondiaux qui auront lieu à Montréal fin mars, et où il devrait largement effacer sa 10e place de l'an dernier. D'ici là, il va effectuer une série de galas, sans doute élever son curseur technique en augmentant la valeur de ses quatre quads du programme libre, en en troquant un par un second lutz ou avec un flip.
Et essayer d'intégrer ce que ce second titre européen signifie dans l'histoire. Chez les hommes, il a désormais dépassé Florent Amodio, sacré une fois en 2011, s'approche de Brian Joubert, qui en a obtenu trois mais jamais deux d'affilée, d'Alain Calmat aussi (trois titres consécutifs), mais reste encore à distance respectable d'Alain Giletti et ses cinq couronnes. Surtout, ces trois-là ont tous été champions du monde une fois (respectivement en 2007, 1965 et 1960). Mais là, c'est une autre histoire.
Luc Economides, de la plonge au grand bain européen
« Et dire qu'il y a un an, je faisais la plonge dans un restaurant, je regardais sur un écran Adam devenir champion d'Europe et je me disais qu'est-ce que je fous là ?" » À 24 ans, Luc Economides s'était alors promis qu'il disputerait ces Championnats d'Europe à Kaunas. Il a tenu parole. Épatant lors du programme court (7e), il s'est laissé submerger par la pression du libre (15e).
« C'est un peu dur, grimaçait-il. Je suis déçu de ma prestation. Mais c'est ma première expérience. Il faut que j'apprenne à manager mon énergie, ne pas forcément être à 100 % à tous les entraînements. À moi de trouver le bon équilibre. » Malgré tout, le vice-champion de France s'est accroché, a montré de jolies choses. Et on imaginerait bien la Fédération française le désigner pour disputer les Mondiaux à la place de Kevin Aymoz, qui s'était fourvoyé autant techniquement que dans le comportement lors du programme court (30e et donc éliminé).
« Espérons qu'il soit récompensé de son début de saison, glissait d'ailleurs Florent Amodio, l'entraîneur d'Economides. Luc a montré un visage de battant, ce serait bien que la Fédé lui fasse confiance. Jusque-là, il n'avait aucune expérience, c'est normal qu'il ait eu la tremblote. Maintenant, tout est permis. »