Rien ne l'aura affecté. De cette chute collective qui a gêné ses principaux adversaires, dont Mathieu Van der Poel, à cette pluie tranchante venue durcir les conditions de la Doyenne quelques instants dans le final, Tadej Pogacar (UAE Emirates) n'aura jamais subi. Il a fait subir. Avec une accélération en plusieurs temps dans la côte de la Redoute, à 34 km de l'arrivée, le Slovène de 25 ans a mis tous ses adversaires au supplice et s'est envolé en solitaire vers sa deuxième victoire sur Liège-Bastogne-Liège (après 2021), son sixième Monument, ce dimanche.
Le Français Romain Bardet, qui est parvenu à se détacher derrière le Slovène, a pris la 2e place. Van der Poel complète le podium après avoir réglé le premier groupe des poursuivants au sprint.
Bastogne n'est pas indiquée pour rien dans le nom de la Doyenne. Ce dimanche encore, c'est seulement après la petite ville voisine du Luxembourg, point intermédiaire où le peloton fait demi-tour pour avaler les côtes les plus difficiles, que la course s'est emballée.
Un premier incident favorable à 95 km de la ligne
Après 160 km d'un scénario stéréotypé où le peloton maîtrisait sa chasse sur une échappée rapidement constituée avec notamment Rémy Rochas (Groupama-FDJ) et Lilian Calmejane (Intermarché-Wanty), une chute collective scindait le peloton en deux, à 95 km de Liège, et certains des favoris, Mathieu Van der Poel (Alpecin-Deceuninck) et Thomas Pidcock (Ineos-Grenadiers) surtout, se retrouvaient bloqués derrière cette barrière de vélos empilés sur le bitume.
Un incident profitable aux UAE Emirates de Tadej Pogacar, épargnés par l'incident, qui creusaient vite près d'1'30'' d'avance sur le groupe des piégés, où Alpecin-Deceuninck semblait avoir baissé les bras, abandonnant le champion du monde à son sort.
Malgré le difficile enchaînement des côtes de Wanne, Sotckeu et Haute-Levée, le Néerlandais allait finalement être maintenu en vie d'abord par les Groupama-FDJ, obligés de rouler pour ramener Romain Grégoire et Valentin Madouas, puis sauvé par les Bahrain-Victorious, Wout Poels et Pello Bilbao qui, à 71 km de Liège, avant le col du Rosier, ramenaient les favoris piégés sur la tête de course.
La Redoute en juge de paix
Les 30 km suivants furent moins spectaculaires si l'on omet l'énorme travail d'essorage de Domen Novak (UAE) puis la tension dans un peloton réduit à une quarantaine d'éléments à l'approche de la Redoute, où Stephen Williams (Israel-Premier Tech), vainqueur de la Flèche Wallone mercredi, s'est écrasé dès les premiers pourcentages difficiles.
Juste avant le démarrage de Pogacar, dans cette fameuse côte d'1,6 km à 8,8 % de moyenne, où seul Richard Carapaz (EF Education-EasyPost) a su résister dans un premier temps, avant de s'effondrer comme tout le monde derrière le Slovène, incroyable de facilité, capable de réaccélérer à plusieurs reprises assis sur la selle.
Fort de 10 secondes d'avance à la bascule, Pogacar n'a ensuite fait que creuser son avance, comptant finalement 1'39'' à l'arrivée sur Bardet. Forcément, le plus intéressant s'est donc joué dans le dos du Slovène, où Romain Grégoire, Ben Healy, Benoît Cosnefroy, et Romain Bardet se sont bien bagarrés avant que l'Auvergnat de Dsm-Firmenich montre qu'il était le plus fort d'entre eux.
Parti dans la dernière difficulté, la côte de la Roche-aux-Faucons, le Français de 33 ans a réalisé un bel exploit pour résister au retour du groupe Van der Poel et prendre la deuxième place, son deuxième podium à Liège, après sa troisième place en 2018.
Le champion du monde néerlandais, plutôt passif sur les 254 km de la Doyenne, décroche tout de même une troisième place encourageante dans l'optique d'une victoire, un jour, à Liège.