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Le Confined Sport Challenge ou l'art d'inventer de nouvelles pratiques

Bertrand Lellouche a multiplié les rous de jardin de 67 mètres. (F. Seguin/L'Equipe)
Bertrand Lellouche a multiplié les rous de jardin de 67 mètres. (F. Seguin/L'Equipe)

A l'initiative de quatre ultra-trailers s'est déroulé samedi une compétition chacun chez soi et sans classement, où on a sué et cogité sans se laisser enfermer par l'épidémie de coronavirus.

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Ils s'étaient donné rendez-vous à dix heures. Un couple avait même prévu « de dormir sur place », pour « ne pas rater » l'heure du clairon. Un couple plein de jambes et d'humour dadaïste bien sûr, puisque tout rassemblement de sportifs est proscrit. C'était chacun chez soi. Le Confined Sport Challenge acte 2.

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Ils étaient 128 partants le week-end précédent, avec moult performances, au sens sportif et/ou artistique du terme. Du marathon de balcon au 200m en déambulateur. « On a voulu pousser plus loin », raconte Bernard Dufour, un des fomenteurs de l'affaire.

Avec trois autres trailers-prescripteurs, Bertrand Lellouche, Grégoire Chevignard et Mélanie Valier, une espèce qui ne se fixe aucune barrière (sauf les sanitaires), le petit rendez-vous Facebook du premier week-end d'ennui est devenu un concept plus affirmé. Très vite un bon millier d'adeptes se sont agglomérés à l'idée. Le quatuor avait montré la voie. Greg en répétant 1000 allers et retour sur le toit de sa péniche. Bernard, heureux propriétaire d'un petit domaine boisé, en y traçant un marathon.

Et Bertrand Lellouche, suivi (en partie) par son fox, « jardinant » autour de son pavillon, sur un parcours, au début herbeux et fleuri de primevères, de 67 m répété 316 fois... « Je ne tiens pas à sortir, ça encourage les dérives, je les vois dans le bois d'à côté. Bien sûr j'ai la chance de ne pas habiter dans un 55 m2, mais le confinement, c'est aussi une expérience, une opportunité. » Toute la semaine, les confinés ont cogité, échangé, mesuré des parcours rabougris, dessiné des dossards ou des médailles, réfléchi à un exercice.

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Samedi, 10 heures, c'était « tous ensemble », mais chacun chez soi, c'était aussi un beau peloton virtuel, qui mélangeait sa sueur et sa résilience par écrans interposés, en live ou en différé. On a vu de tout et partout.

Yannick, 550 boucles de 56m dans la descente de son garage.

Greg, lancé seul sur « le parcours officiel » de l'UTMJ, l'Ultra Trail de Mon Jardin, référence bien sûr à celui du Mont-Blanc qui peut-être, fin août, marquera la première respiration collective d'un monde nettoyé.

Greg traçant un improbable parcours toboggans dans des étages, passant devant la bibliothèque et les Fleurs du mal, puis dans la chambre d'un ado assoupi, senteurs du jeune mâle garanti.

Yoan, les cannes cassées par ses 14 x 25 étages du samedi d'avant au Marriott de Bahrein, privilégiant cette fois les bras, avec cent séries de cent pompes.

Isabelle, rétive aux 42 km d'un marathon, mais lancée pour 42 fois une minute de corde à sauter « avec ma voisine du dessous qui s'est posée beaucoup de questions. »

Et Bertrand au catogan, bien sûr, qui n'a pas labouré son jardin jusqu'au bout mais qui a néanmoins pulvérisé le record du monde du marathon de Kipchoge, en mixant course et home-trainer.

C'était comme une conf-call de hamsters. Et comme le master ne s'arrête jamais, ça recommence samedi, acte 3.

publié le 28 mars 2020 à 18h19
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