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Belle and Sebastian : « Le sport est une grande métaphore »

Ne vous fiez pas à son imagerie, Belle and Sebastian est très porté sur le sport. (DR)
Ne vous fiez pas à son imagerie, Belle and Sebastian est très porté sur le sport. (DR)

Référence de la pop indépendante, le groupe Belle and Sebastian se nourrit de la passion du chanteur Stuart Murdoch pour l'athlétisme, le foot et le baseball.

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Les chansons peuvent parfois mentir, et il ne faut pas croire Stuart Murdoch quand il fredonne I don't want to play football. Dans ce court morceau sorti en 2002, le leader de Belle and Sebastian se dépeint en personnage réfractaire au ballon : « Je ne comprends pas les règles, je ne veux pas qu'un idiot me donne des consignes, que des inconnus me mettent des coups. »

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Dans la vie, le discours de l'Écossais (51 ans) est bien différent : « C'est le sport que je préfère pratiquer, ça donne tellement de plaisir. Et quand j'étais jeune, l'exemple le plus inspirant venait de notre équipe nationale. On a joué la Coupe du monde de 1974 à 1990, mais on décline et c'est dommage. »

Ce n'est pas si grave car il aime beaucoup d'autres sports et il est ainsi fasciné par les Jeux Olympiques, mis à l'honneur au cours du concert qu'a donné son groupe le 1er novembre à Paris, lors du Pitchfork Festival dont il était une tête d'affiche.

« À chaque fois qu'on se produit dans une ville qui a accueilli les Jeux, on joue The Stars of Track and Field (les vedettes de l'athlétisme) et on passe des images d'exploits sur l'écran, explique Murdoch. Avant Londres en 2012, on a préparé des séquences instrumentales pour accompagner chaque épreuve mais on n'a pas pu aller au bout. On a sorti un autre morceau pour Rio en 2016. » Le titre évoque le village olympique à 6 heures du matin, et la mélodie au charme rétro est illustrée par une vidéo qui compile des grands moments des Jeux.

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Cette attirance trouve son origine dans l'adolescence du chanteur, qui a couru le marathon de Glasgow en 2h57 à dix-huit ans, avant d'être profondément affaibli par un syndrome de fatigue chronique. « Je faisais beaucoup de sport, mais j'ai commencé à écrire sur le sujet quand je suis tombé malade et que je n'ai plus pu en faire. Le sport est une grande métaphore de la vie qui n'est pas utilisée par beaucoup d'artistes, observe-t-il.

« À moins d'être une superstar, c'est difficile d'en approcher. On n'est pas assez célèbres (rires) ! Si vous êtes Rod Stewart ou Jay-Z, on vous amène où vous voulez »

Stuart Murdoch, chanteur de Belle and Sebastian

En 2003, on le voit pourtant courir tout au long du clip d'I'm a Cuckoo, entraîné par son compatriote Alan Wells qui a gagné le 100 mètres des Jeux de Moscou en 1980. « Il a amené sa médaille sur le tournage, c'était marrant qu'il joue notre coach, sourit Murdoch, qui n'a pas l'habitude de côtoyer des grands athlètes. À moins d'être une superstar, c'est difficile d'en approcher. On n'est pas assez célèbres (rires) ! Si vous êtes Rod Stewart ou Jay-Z, on vous amène où vous voulez. On a juste rencontré Xabi Alonso quand il jouait à Liverpool. Il est un grand fan de Belle and Sebastian, il est venu à un concert et était très gentil. »

Les Écossais ont aussi essayé d'inviter Andy Murray, « un héros national », mais le tennisman n'a jamais pu se libérer. En attendant, Murdoch va réaliser un autre rêve : « Ma sportive préférée est Jessica Ennis (championne olympique de l'heptathlon en 2012) car j'admire sa capacité à savoir tout faire et elle est magnifique. Je vais faire une conférence au Portugal où elle sera, et ma femme sait que je l'aime vraiment beaucoup. Elle m'a averti : ''Attention, tu n'as pas le droit de lui parler !'' (rires) » A-t-il évité de consacrer une chanson à Ennis pour sauver son couple ? Murdoch a plutôt dédié Piazza, New York Catcher à Mike Piazza, receveur des New York Mets qui suscitait moins de jalousie.

Le baseball n'est pas une discipline répandue en Écosse, où la passion de Murdoch est née devant la télévision : « J'ai commencé à en regarder beaucoup à une époque où je n'avais pas de copine... Puis ma femme m'a amené voir les Mets, j'ai adoré. C'est le passe-temps le plus typiquement américain. Si vous aimez l'Amérique, vous aimez le baseball car ça colle à leur style de vie, relax. Quand on va à l'étranger, je n'aime pas me sentir comme un touriste. Au baseball, vous ne vous sentez pas touriste. »

Originaire de Floride, sa femme a profité d'un camp d'entraînement des Mets dans la région pour approcher Piazza et lui demander un autographe. Déception. « Il est très costaud, et ma femme est assez petite. Il s'est juste arrêté pour lui dire, désolé gamin, je dois aller courir là... (rires) »

Le conflit religieux entre les deux clubs de Glasgow a refroidi Murdoch à l'adolescence

Dans le couple, les découvertes se font aussi dans l'autre sens. « J'adore assister au dernier jour du British Open de golf, à Saint Andrews. Ma femme était persuadée que c'était ennuyeux mais elle ne s'est jamais autant éclatée car il y a une super ambiance, savoure Murdoch. Mon plus grand souvenir de sport a d'ailleurs eu lieu au British Open, avec Jean Van de Velde en 1999. Il avait trois coups d'avance au dernier trou, tu te dis que même toi, tu pourrais gagner. Et il a tout perdu, les pieds dans l'eau... C'était si douloureux à voir. » Le golfeur n'est pas le seul Français qui a marqué le chanteur, impressionné par « le grand Serge Blanco » à l'époque où le rugby était joué par des « acrobates moins bodybuildés ».

Mais on en revient toujours au foot. Chris Geddes, le claviériste du groupe, évoque Odsonne Édouard ou Olivier Ntcham, les Bleuets qui font le bonheur du Celtic Glasgow dont il est fan : « Étudiant, je travaillais au Celtic Park les jours de match. Dès que j'ai gagné de l'argent avec le groupe, j'ai abandonné ce job pour m'acheter un abonnement. »

« Notre musique n'est pas faite pour les stades »

Stuart Murdoch

Murdoch était supporter des Rangers, mais le conflit religieux entre les deux clubs de Glasgow l'a refroidi à l'adolescence et il suit depuis Ayr United, un petit club de deuxième division qui correspond davantage à l'indie pop de Belle and Sebastian. « Notre musique n'est pas faite pour les stades, estime Geddes. Dans le bus, on regardait un documentaire sur Def Leppard (groupe de heavy metal) où ils disaient que pour jouer dans des Arenas, il fallait faire de la musique pour Arena. Ce n'est pas notre cas... »

Murdoch poursuit : « J'ai réfléchi à la façon dont un groupe attire un public dix fois plus grand, au moment où Queen a fait We are the champions ou We Will Rock You, des chansons taillées pour Wembley. Mais c'est beaucoup trop d'efforts (rires). Et la plupart des grands hymnes de sport, comme You'll never walk alone, le sont devenus par accident. » Qui sait, les supporters de foot chanteront donc peut-être un jour sur un air de Belle and Sebastian.

publié le 1 décembre 2019 à 10h00
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