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Le calvaire de Robin Söderling, entre mononucléose et détresse

Robin Söderling en 2010. (S. Boué/L'Équipe)
Robin Söderling en 2010. (S. Boué/L'Équipe)

Lors d'un long entretien avec la radio publique suédoise, Robin Söderling est revenu sur le calvaire de ses derniers mois dans la peau d'un joueur pro. En détresse physique et psychologique, il s'est renseigné sur Google sur les manières de se suicider.

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Juillet 2011 : Robin Söderling triomphe à domicile grâce à sa victoire en finale à Bastad. À 26 ans, le Suédois s'est installé dans le paysage (deux finales à Roland-Garros et une victoire monumentale contre Rafael Nadal au passage) et réalise une jolie saison avec quatre titres au compteur. Mais le cinquième mondial ne retrouvera jamais les courts après son trophée en Suède. La faute à une mononucléose qui affaiblit son corps. La faute, aussi, a une détresse psychologique, a-t-il révélé lors d'un entretien avec la radio publique suédoise.

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Söderling, qui n'a officiellement pris sa retraite qu'en 2015, soit quatre ans après son dernier match officiel, raconte une scène juste avant le lancement de l'US Open 2011. Dans un restaurant à New York, il a compris qu'il ne pourrait pas jouer le tournoi.

« J'ai paniqué, j'ai commencé à pleurer. Je pleurais et pleurais. Quand je suis rentré à l'hôtel et que je me suis jeté sur le lit, chaque fois que je pensais à retourner sur le court, je commençais à paniquer. Pour la première fois j'ai senti que, quelle que soit ma volonté, je ne pourrais pas (aller jouer). Même si on m'avait mis un pistolet sur la tempe. »

En 2009, Söderling signe l'exploit de sa carrière : il s'offre Rafael Nadal à Roland-Garros. (Pochat/L'Équipe)
En 2009, Söderling signe l'exploit de sa carrière : il s'offre Rafael Nadal à Roland-Garros. (Pochat/L'Équipe)

« J'avais une anxiété permanente, ça me rongeait de l'intérieur. »

Robin Söderling

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Comme à Cincinnati quelques semaines plus tôt, il déclare forfait pour le Grand Chelem américain. Son agent évoque un « virus » ainsi que « des maux de tête et d'estomac ». Le diagnostic tombe peu après : le Suédois souffre d'une mononucléose. Près de dix ans plus tard, il reconnaît qu'il a sombré peu après son titre à Bastad et qu'il n'a jamais réussi à traverser cette période, à la fois compliquée sur le plan physique et sur le plan psychologique. Jamais son corps et son esprit n'ont accepté un retour sur un court malgré ses tentatives.

« J'avais une anxiété permanente, ça me rongeait de l'intérieur, a-t-il détaillé au micro. Je me tenais assis dans mon appartement et je regardais le vide sans comprendre. Le moindre bruit ou mouvement me faisait paniquer. Quand une lettre tombait sur le paillasson, je paniquais tellement que je tombais sur le sol. Si le téléphone sonnait, je tremblais de peur. » Un mal-être qu'il exprime sans détour : « Je ne pouvais me soigner alors que le seul que je détestais, c'était moi-même. »

Robin Soderling à Roland-Garros en 2011. (P. Lahalle/L'Équipe)
Robin Soderling à Roland-Garros en 2011. (P. Lahalle/L'Équipe)

Son talent ? « Un cadeau et une malédiction »

Il raconte la galère de son quotidien, de chaque heure, de chaque minute qui n'en finissent plus de s'écouler. Un jour, il découvre dans l'historique de son ordinateur qu'il a « cherché différentes manières de se suicider». Il n'a alors aucun souvenir d'avoir fait cette recherche et martèle aujourd'hui : « Je n'ai jamais voulu mourir mais tout était mieux que cette vie en enfer. »

Söderling, quatrième mondial à son meilleur en 2010, évoque aussi lors de cet entretien la pression du sport de haut niveau. « Il n'y avait que trois joueurs contre qui je pouvais perdre. Les autres, je devais les battre sinon je me sentais mal, un raté, un perdant. » Son talent raquette en main ? « À la fois un cadeau et une malédiction », estime-t-il.

Il espère que son témoignage servira. « On parle rarement des problèmes psychologiques des sportifs de haut niveau et c'est pour ça que je voulais témoigner. À ceux qui se consacrent au sport ainsi qu'à leurs parents, je leur conseille de s'entraîner dur et de se détendre. Faîtes du sport et rêvez mais si vous avez du succès, gardez du recul et construisez une vie à côté, ce que je n'ai pas réussi à faire. »

publié le 5 juillet 2020 à 16h06 mis à jour le 6 juillet 2020 à 09h34
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