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Un centre de recherche néo-zélandais appelle les joueurs de rugby à donner leur cerveau à la science

Le deuxième ligne James Broadhurst (au centre) en 2015 sous le maillot des All Blacks, en Afrique du Sud. (Ashley Vlotman/Presse Sports)
Le deuxième ligne James Broadhurst (au centre) en 2015 sous le maillot des All Blacks, en Afrique du Sud. (Ashley Vlotman/Presse Sports)

Le Centre de recherche sur le cerveau de l'Université d'Auckland va lancer une grande étude sur les effets des commotions cérébrales dans le sport. Il appelle les joueurs de rugby, une fois décédés, à donner leur cerveau à la science.

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Le Centre de recherche sur le cerveau (CBR) de l'université d'Auckland va lancer une grande enquête sur les méfaits à long terme des traumatismes crâniens et K.-O. dans le sport. L'établissement a appelé vendredi à ce que d'anciens sportifs de haut niveau donnent leur corps à la science afin d'étudier leur cerveau. Le centre est particulièrement intéressé par les sports où les chocs à la tête sont fréquents comme le rugby et la boxe.

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Les commotions cérébrales sont un problème grandissant dans le sport néo-zélandais. L'année dernière, plus de neuf mille ont été recensés parmi les sportifs non majeurs toutes disciplines confondues.

Notre culture sportive en Nouvelle-Zélande laisse une large place aux sports de contact. Il est donc important que notre pays prenne part aux études

Richard Faull, directeur du Centre de recherche sur le cerveau

« Notre culture sportive en Nouvelle-Zélande laisse une large place aux sports de contact. Il est donc important que notre pays prenne part aux études sur la question », a expliqué le docteur en neurosciences, Richard Faull, qui dirige le centre de recherche sur le cerveau.

« Ajouter les blessures de sport dans notre champ d'études déjà existant est une étape importante pour le CBR, déclare le centre dans un communiqué. Cela permettrait de mieux connaître l'impact des blessures et traumatismes sur le cerveau. Cela reflète aussi la préoccupation de plus en plus grande de la recherche internationale pour ces commotions répétées qui engendrent des maladies comme l'encéphalopathie traumatique chronique (ETC). »

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L'ancien pilier all black Ben Afeaki donnera son cerveau à la science

L'ETC est une maladie évolutive. Elle était anciennement nommée « encéphalite traumatique des pugilistes » du fait que de nombreux boxeurs montraient des signes de démence. Les symptômes de l'ETC sont multiples, comme la difficulté à gérer ses émotions, l'hyperagressivité, les troubles amnésiques ou la dépression. Elle ne peut être formellement étudiée qu'après décès.

Le CBR a aussi déclaré que la banque de données du cerveau en Nouvelle-Zélande, qui centralise les dons de cerveau dans le pays, collaborera avec son homologue américaine, la Concussion Legacy Foundation Brain Bank. Aux États-Unis, la NFL fait face à des nombreuses plaintes d'anciens joueurs de football américains professionnels.

Ces dernières années de nombreux joueurs de rugby pro ont dû stopper leur carrière en raison de la répétition des commotions. Le deuxième-ligne all black James Broadhurst ainsi que le pilier Ben Afeaki, tous deux All Blacks, ont pris leur retraite à l'âge respectivement de 29 et 27 ans, à la suite de K.-O. à répétition subis en matches. Afeaki a déclaré vendredi qu'il donnera son cerveau à la science.
Il y a quelques années le témoignage d'un autre All Black, Steve Devine, avait choqué la Nouvelle-Zélande. Le demi de mêlée, qui avait stoppé sa carrière en 2007 après de multiples traumatismes crâniens, avait évoqué ses journées entières enfermé dans sa chambre et dans le noir, ne supportant plus la lumière du jour.

L'ancien pilier de Colomiers Stéphane Delpuech. (S. Thomas/L'Équipe)
L'ancien pilier de Colomiers Stéphane Delpuech. (S. Thomas/L'Équipe)

Les problèmes des commotions et de suspicion d'ETC ne se limitent pas à la Nouvelle-Zélande. Le témoignage de Stéphane Delpuech avait lui aussi fait grand bruit en 2015. L'ancien pilier de Colomiers racontait cette entrée au joug en 2002 à l'entraînement qui l'avait sonné et avait entraîné immédiatement des maux de tête. « À partir de ce jour-là, je n'ai jamais pu revenir à mon niveau et tout a changé », expliquait-il.

« Je peux passer d'un état d'hyperénervement, où je pourrais même être violent, à une phase de dépression profonde, expliquait-il dans un entretien à L'Équipe en 2015. Violent jusqu'à même avoir des envies de meurtre. [...] Je commence par avoir des troubles de concentration, de violents maux de tête, des douleurs incessantes. Les idées deviennent noires, très noires. J'ai parfois aussi eu des envies de suicide. »

publié le 6 décembre 2019 à 10h59
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