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Championnats du monde amateurs : mauvaise journée pour les Bleus

Mathis Chevalier, champion d'Europe en titre (à gauche), après sa défaite au 2e tour. (CFMMA)
Mathis Chevalier, champion d'Europe en titre (à gauche), après sa défaite au 2e tour. (CFMMA)

Après une très bonne première journée, les Bleus ont déchanté mardi lors des quarts de finale juniors et les 16es de finales seniors. Sur les 13 combattants engagés, 5 ont gagné le droit de remettre le couvert mercredi. Mathis Chevalier, champion d'Europe junior en titre poids moyen, s'arrête là.

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Les jours se suivent et ne ressemblent pas pour les Bleus engagés aux Championnats du monde amateurs disputés à Bahreïn. Après une première journée historique avec un ratio victoires/défaites de 9/4, la tendance s'est inversée au 2e jour de la compétition : 5/8. Deux victoires par soumission (Christophe Przywara et Anthony Fresno-Eyssette), un TKO (Rayan Chaieb) et deux victoires à la décision chez les juniors (Rayane Suaze et Jordan Zebo) n'effacent pas complètement les revers, notamment un gros K.-O. subi en poids lourds.

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Celle qui passe le plus difficilement pour les entraîneurs de l'équipe de France est sans doute celle de Mathis Chevalier en poids moyen. La délégation française nourrissait de grosses ambitions pour le champion d'Europe junior en titre, désormais chez les seniors : une médaille assurément, le titre surtout potentiellement.

Dans le vestiaire, le jeune homme de 21 ans, le visage marqué, explique sa défaite par « un manque de maturité ». « Je n'ai pas la bonne gestion de l'émotion. Je suis trop tendu ou trop détendu. C'est la boxe qui m'a manqué également. Et puis j'ai fait des erreurs techniques. J'aurais pu le renverser à plusieurs reprises, je ne l'ai pas fait. Il me faut plus de combats, il faut que je fasse des compétitions de boxe anglaise pour progresser. » Disponible, souriant malgré la défaite, Chevalier explique que c'est presque un mal pour un bien. On le sent presque soulagé. Il dit qu'il n'est pas vraiment déçu, sans doute beaucoup moins que ses coaches. Celui qui a déjà 30 ou 40 combats de MMA au compteur en veut toujours plus, sans forcément penser à passer professionnel. Pour cet enfant de Grigny, le MMA sert de thérapie.

« Il m'a fallu beaucoup de temps pour comprendre que tout le monde n'a pas le même rapport à la violence »

Mathis Chevalier

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« Le MMA, c'est un travail de compréhension de moi-même. Plus j'en fais, plus je combats, plus je me comprends émotionnellement », ajoute-t-il. 16 ans de judo, 6 de MMA et une adolescence plongée dans l'agressivité et la violence. « Il m'a fallu beaucoup de temps pour comprendre que tout le monde n'a pas le même rapport à la violence. » Un peu perdu dans les barres d'immeubles du 91 dans sa jeunesse, le bonhomme de 84 kg, aussi explosif dans une cage qu'il semble désormais posé dans la vie, n'a pas honte d'avouer qu'il se cherche encore.

Premier de la classe ou dernier selon les jours, Mathis Chevalier a plongé dans le MMA non pas par passion - « je ne suis pas du genre à me gaver de vidéos » - mais d'abord pour sortir des normes. « Le MMA était interdit, c'est ça qui m'a plu quand j'étais ado, et le côté instinctif du combat également. C'était pour moi le symbole d'une rupture avec l'école et, finalement, ça m'a permis de me réconcilier avec la connaissance. Apprendre plein de techniques différentes m'a redonné le goût d'apprendre, m'a donné envie de lire des bouquins moi qui ne lisait jamais. Je me suis rendu compte que j'étais curieux », confie le champion d'Europe junior.

Cette agressivité, cette violence y compris verbale, il ne la manifestait pas seulement à l'extérieur mais aussi dans ses relations familiales. « J'étais très fermé, je ne souriais jamais, j'avais toujours les sourcils froncés. J'ai vu un paquet de psychologues et psychiatres, ça a mis du temps avant que je comprenne la démarche. Le MMA m'a permis de me cadrer, à mieux gérer ma perception de la violence beaucoup plus rapidement. Mes parents m'ont beaucoup aidé également. Avant, j'étais dans le rejet de tout. »

« L'homme le plus fort, c'est celui qui sait sourire »

Mathis Chevalier

Maintenant, Mathis Chevalier s'accepte mieux lui-même, et forcément mieux les autres. Même s'il conserve des stigmates. « Avant les Championnats d'Europe, je n'étais pas dans la lumière. Mon titre a apporté des sollicitations, ça m'a pris la tête. Ce n'est peut-être pas une si mauvaise chose d'avoir perdu. » Sorti de l'école sans le Bac, le garçon a multiplié les petits boulots (boucher, charcutier, serveur, employé dans un supermarché...). Aujourd'hui, il donne des cours à de jeunes enfants, fait du MMA et aimerait bien faire du théâtre. « Je crois que je suis quelqu'un de frustré à la base. Les combats me permettent d'évacuer cette frustration. »

Le moteur de Mathis Chevalier, c'est la recherche de l'épanouissement, en ayant appris à mettre sa peur de côté. « Je crois qu'une partie de mon comportement passé s'explique parce que j'avais peur. J'étais fermé, triste, je ne souriais jamais. J'ai réalisé qu'en fait l'homme le plus fort, celui qui n'a pas peur, c'est celui qui sait sourire. »

publié le 12 novembre 2019 à 22h34 mis à jour le 16 novembre 2019 à 17h21
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