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La cohabitation entre QRM et le FC Rouen cloche toujours

Pendant que QRM évolue en Ligue 2, le FC Rouen fréquente le National. (E. Garnier/L'Équipe)
Pendant que QRM évolue en Ligue 2, le FC Rouen fréquente le National. (E. Garnier/L'Équipe)

Depuis la fusion avortée avec QRM (L2) en 2015, le FC Rouen (National) a poursuivi sa reconstruction tant bien que mal dans l'ombre de son voisin. Avec l'espoir de retrouver un jour sa place de numéro 1 dans l'agglomération.

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Pour la première fois depuis une éternité, les rôles sont inversés. Historiquement, quand les matches de Coupe de France se présentent dans la région, c'est vers son encombrant voisin, habitué aux épopées et finaliste de l'épreuve en 2012 (défaite 0-1 contre l'OL), que les yeux sont tournés. Mais cette saison, après l'élimination prématurée de l'US Quevilly-Rouen-Métropole (L2, défaite 0-1 contre Feignies-Aulnoy, N2, le 5 janvier en 32es de finale), c'est au tour du FC Rouen 1899 (5e de National), porté par son élan en Championnat, de recevoir les honneurs.

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En réalisant le chemin parcouru et les difficultés surmontées par le club ces dernières années, son président Charles Maarek (52 ans) ne peut s'empêcher de plaisanter. « Le FC Rouen, c'est un petit Marseille, c'est Dallas ! souligne le marchand de biens immobiliers, qui reçoit dans ses bureaux en face de la cathédrale. On adorait cette série. J'aimerais quand même que ce soit un peu moins mouvementé, on va y arriver. »

« La situation actuelle est paradoxale avec, d'un côté, les meilleures performances sportives depuis dix ans et, de l'autre, un marasme ambiant en coulisses »

Un fidèle du FC Rouen

Malgré les résultats probants de l'équipe fanion depuis sa nomination en 2022, tout n'est pas rose pour le volubile dirigeant, dont le visage maquillé en clown est placardé sur les murs de la ville aux cent clochers. Depuis plusieurs mois, il fait face à une forte contestation des supporters, qui lui reprochent sa mauvaise gestion financière (voir par ailleurs). « La situation actuelle est paradoxale avec, d'un côté, les meilleures performances sportives depuis dix ans et, de l'autre, un marasme ambiant en coulisses », constate un fidèle du FCR depuis une quinzaine d'années.

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Il aura fallu plus de dix ans à l'ancien pensionnaire de Division 1 (1946-1948, 1961-1970, 1977-1978 et 1983-1985) pour se relever de sa liquidation judiciaire prononcée en 2013, entraînant sa rétrogradation en Division d'honneur (6e échelon). C'est à cette période qu'un nouveau projet de fusion avec l'US Quevilly, renommée en 2015 sous l'impulsion de la métropole, voit le jour. Avec pour objectif de « regrouper les forces pour construire un club professionnel stable dans l'agglomération rouennaise », rembobine Anthony Boyer, ex-directeur de la communication à QRM (2016-2018).

« L'idée était d'abord de se fiancer et de voir si un mariage était possible, poursuit l'ancien collaborateur de Michel Mallet, le président historique de Quevilly. Mais cela a entraîné la fronde des supporters, qui avaient l'impression de se faire voler leur stade, leurs couleurs et leur club. Mallet l'avait mesuré mais pensait que ça rentrerait dans l'ordre. Or, cela a réveillé le FC Rouen. »

Les joueurs de QRM possèdent un vestiaire à plein temps, pas ceux du FC Rouen

« Le projet était cohérent, développe Sarah Vauzelle, adjointe aux Sports à la mairie de Rouen. Sauf qu'il était mal ficelé et rien ne s'est passé comme prévu. Dès le début, ça n'a pas plu que l'USQ prédomine. Des maladresses ont été commises alors que la cohabitation était plutôt saine jusqu'en 2015. Je comprends que le FC Rouen ait pu se sentir humilié, qu'il ait pensé qu'on veuille l'effacer. Clairement, c'est un échec sportif, comme au niveau de la popularité. »

Cet épisode a laissé des traces des deux côtés, dans une configuration géographique inédite en France à ces niveaux de compétition. Sollicité, l'actuel président de QRM, à l'initiative de la fusion, a poliment refusé de s'exprimer. Son club, actuellement en difficulté en Ligue 2 (18e), vient de se séparer de son entraîneur, Olivier Echouafni. « Pas besoin de médiatiser » un sujet encore brûlant. Lors de sa dernière prise de parole publique, le 12 janvier dans Paris-Normandie, Mallet s'était montré bref : « Les choses se sont pacifiées, on est focus sur notre projet. Chacun vit sa vie. » Une version confirmée par Maarek, lui-même ancien vice-président de l'USQ (1999-2002), qui évoque des « rapports très cordiaux » et « un respect mutuel » entre dirigeants.

Cela ne l'empêche pas de dénoncer « le néant total en termes d'infrastructures » dont son club souffre aujourd'hui, en raison du choix de la métropole de favoriser le mieux classé dans son accompagnement. Les disparités constatées dans le vieux stade Robert-Diochon, actuellement en rénovation, dans l'attente d'une nouvelle enceinte dont le projet est en réflexion, sautent aux yeux. Les joueurs de QRM y possèdent un vestiaire à plein temps, tandis que ceux du FCR partagent le leur avec le troisième club résident, le Rouen Normandie Rugby (Pro D2). Ce qui donne lieu à des scènes cocasses, comme jeudi, avec Axel Maraval, croisé sur le parking en train de ranger ses affaires dans le coffre de sa voiture, après l'entraînement.

Charles Maarek, le président du FC Rouen. (F. Faugère/L'Équipe)
Charles Maarek, le président du FC Rouen. (F. Faugère/L'Équipe)

« La semaine, on mange notre pain noir. On n'attend qu'une chose, c'est de jouer le week-end », explique le gardien titulaire du FCR, autorisé avec ses partenaires à fouler la pelouse du terrain d'honneur uniquement pour les rencontres officielles. Le reste du temps, ils doivent se contenter des deux synthétiques adjacents, recouverts d'une épaisse couche de neige ce jour-là, et d'un terrain privé loué dans les environs, quand leurs voisins, mieux considérés, disposent d'une autre pelouse sur place. « Même pour QRM, je ne comprends pas qu'il n'y ait pas de projet (de centre d'entraînement), poursuit l'ancien Nîmois. On est déjà allés jouer contre des clubs de R1 qui ont de meilleures installations. »

« J'ai toujours trouvé que la fusion était une connerie »

Charles Maarek, président du FC Rouen

Même s'il s'est réduit dernièrement, l'écart reste aussi important pour les subventions versées cette saison par la métropole aux deux clubs : 768 000 € (prestations comprises) à QRM, contre 211 000 pour le FC Rouen, qui touche également 130 000 € de la municipalité. Le budget du premier est deux fois supérieur (8 M€ pour QRM contre 4 pour le FCR). « Pour différentes raisons, le rapport de force s'est inversé, constate Maarek. J'ai toujours trouvé que la fusion était une connerie parce qu'il y a deux belles histoires, celle de Quevilly, un des plus beaux clubs amateurs de France, et le FC Rouen avec sa longue histoire. Peut-être qu'un jour chacun retrouvera sa place. »

En attendant, conclut un membre des Rouen Fans - le principal groupe d'ultras du FCR, dont les leaders n'ont pas répondu à nos sollicitations -, cet obstacle supplémentaire a eu « le mérite d'unir tous les supporters autour d'une cause commune, celle de remettre en lumière LE club de la ville ».

Les finances du FC Rouen en point d'interrogation
Pénalisé de 5 points par la DNCG, le 28 novembre, pour un sérieux problème de créances, le FC Rouen 1899 pourrait figurer plus haut au classement de National. Son appel sera étudié fin janvier ou début février devant le CNOSF, qui rendra un avis consultatif avant l'étude du dossier par le tribunal administratif. Des perspectives qui n'inquiètent pas le président Charles Maarek (notre photo) : « Je peux assurer aux supporters qu'il n'y aura pas de dépôt de bilan. Il n'y aura aucune dette en fin de saison. » Rassuré par la validation de ses chiffres par un commissaire au compte, le dirigeant table sur une rentrée de 800 000 euros minimum avec la Coupe de France et les derniers transferts réalisés pour régulariser la situation. H. S.
publié le 21 janvier 2024 à 00h05 mis à jour le 21 janvier 2024 à 00h05
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