L'ÉQUIPE

Esport - League of Legends : pour l'Occident, ce nouveau fiasco aux Worlds doit sonner son réveil

G2 (Europe), à la fois déception et espoir de l'Occident ? (Yicun Liu/Riot Games)
G2 (Europe), à la fois déception et espoir de l'Occident ? (Yicun Liu/Riot Games)

Avec une seule équipe nord-américaine en play-offs, balayée par la tête de série n°4 de la Chine, l'Occident a probablement réalisé cette année sa pire performance aux Mondiaux de « League of Legends »en 13 éditions. Si les manques semblent avoir été identifiés depuis quelques années, rien ne semble évoluer dans le bon sens. Ce nouveau fiasco peut-il enfin changer la donne ?

ma liste
commenter
réagir

Pour la troisième année consécutive, aucune équipe occidentale sur les sept en lice au début de la compétition ne disputera les demi-finales des Mondiaux de League of Legends le week-end prochain. Le dernier espoir, NRG, champion en titre des LCS (la ligue nord-américaine), dépassé individuellement et collectivement, a été balayé en quarts, dans une relative indifférence au sein d'une Sajik Arena de Busan (Corée du Sud) dépeuplée. Tête de série n°4 de la Chine et tirage considéré comme abordable a priori, Weibo s'est imposé sèchement (3-0), barrant ainsi l'entrée d'un club duquel l'Ouest se fait recaler depuis 2020.

L'ÉQUIPE

Le résultat est sévère, mais à la hauteur des prédécesseurs de NRG : en 2021 (Cloud9, MAD Lions), puis en 2022 (Rogue), les représentants occidentaux en quarts n'avaient pas remporté la moindre manche en play-offs eux non plus. Des claques successives qui renforcent un constat qui dure : ni l'Europe, ni l'Amérique du Nord ne sont au niveau de la Corée du Sud et de la Chine. Et rien ne change vraiment.

Pour la première fois depuis 2014 le Vieux Continent n'a, lui, même pas pu étendre ses espoirs au-delà du premier tour. Avec peut-être le meilleur joueur de sa région à chaque poste, G2 était probablement le meilleur prétendant de l'Ouest. Mais l'ambitieux champion d'Europe a trébuché sur NRG. Et les marches GenG (champion et n°1 de la Corée du Sud) puis BLG (n°2 de la Chine) étaient, elles, trop hautes.

L'ÉQUIPE

Des problèmes bien identifiés

« Je ne pense pas qu'il y ait de grandes différences sur le plan individuel, affirme pourtant Su-hwan « Peyz » Kim, le très jeune (17 ans) adc de GenG. L'écart se creuse plus sur comment on comprend et joue le jeu collectivement. » Ian Victor « FBI » Huang, son homologue australien de NRG, confirme, mais ajoute : « Il y a beaucoup de choses qui peuvent expliquer ce gouffre qui nous sépare. La densité de bons joueurs, la diversité de champions que nous sommes capables de jouer, mieux comprendre comment l'adversaire évolue pour répondre de la bonne façon, la qualité des entraînements, de la soloq... Il y a du travail, mais nous pouvons le faire. »

Bien que lucide et assez simple, ce discours et cette liste non exhaustive sur les manques renvoient toutefois un sentiment de « déjà-vu » agaçant. Le constat est le même depuis plusieurs années : il y a des choses à modifier, bien identifiées par tout le monde, il faut travailler plus, être plus sérieux, l'Occident en est capable... Mais il vient de présenter son pire bilan en 13 ans. Les solutions sont connues, alors où sont les changements ?

Une période faste en trompe-l'oeil

Il semble toutefois possible d'identifier un début de progrès. Si sarcasmes et moqueries ont plu sur G2 après son élimination au premier tour - une réponse aux ambitions affichées et assumées par le finaliste des Mondiaux en 2019, qui visait au moins une demi-finale cette fois -, Rasmus « Caps » Winther et ses coéquipiers sont sans doute les seuls à avoir entamé une mutation cette année. Sérieux tout au long de la saison dans leur approche de l'entraînement comme de la compétition, décidés à renverser le statu quo, ils ont posé les bases d'un standard qui devrait déjà être une norme pour des joueurs en quête de succès internationaux. Mais ils sont trop seuls.

Certes, le résultat ne vient pas étayer cette affirmation. Mais même du côté de NRG, l'un des bourreaux de G2, on acquiesce : « Dans une vidéo, on a vu Caps parler de la préparation et de l'approche mentale de tout ce qui se passe dans une saison, du fait d'être sérieux du début à la fin à l'entraînement, en matches... Oui à 100 %, ça a une influence sur ce qui se passe pendant les Worlds et ça fait défaut à beaucoup. Je pense que nous n'avons pas vu tout le potentiel de G2 cette année. Un peu comme nous en 2018, en finale », glisse l'un des coachs de NRG, Paul « sOAZ » Boyer, battu par Invictus Gaming (3-0) il y a cinq ans alors que le Français jouait pour le titre.

« Si tu veux des joueurs de foot de haut niveau, il faut qu'ils soient capables de courir un marathon ou presque. Pour nous, ce cardio c'est la soloq et les scrims. Alors on doit optimiser ce qu'on y fait. »

Romain Bigeard, manager général de G2 Esports, début septembre

Cette fin des années 2010 est vue comme période « faste » pour l'Europe, qui a enchaîné par une deuxième finale consécutive grâce à G2. Achevée par un autre revers 3-0, elle est finalement restée vide de succès aux Worlds. Encore contemplée avec nostalgie, elle a aujourd'hui des allures de trompe-l'oeil : le LEC n'a pas surfé dessus et, pire, n'a rien vraiment produit « collectivement ». Il s'est juste reposé sur deux très bonnes équipes sur des périodes trop courtes.

G2 à la tête du changement

Au lendemain de l'élimination de G2 en Corée du Sud, son manager général, Romain Bigeard, a posté sur X (ex-Twitter) plusieurs photos. Les très bons résultats en scrims (les parties d'entraînement) ces derniers mois ont attiré l'oeil et monopolisé les commentaires.

Mais il y a surtout glissé des indices sur le fonctionnement de son équipe, ce qu'elle a mis en place : calendrier, rythme de travail, gestion des périodes « off », multiplication des entretiens individuels... Un subtil appel du pied en direction de ses concurrents, afin de les inciter à avancer ensemble et espérer mieux dès les prochains Worlds... en Europe. Le résultat est décevant mais le processus est prometteur. G2, qui travaillera avec la même équipe l'an prochain pour pousser ces premières bases plus loin, a commencé à paver une très longue voie. Sa prise de conscience doit désormais se répandre, pour que ce fiasco reste à jamais la pire performance de l'Occident.

publié le 7 novembre 2023 à 17h48 mis à jour le 7 novembre 2023 à 17h50
Les commentaires sont soumis à des règles de modération. lire la charte