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Quel est votre plus beau Tour des Flandres?

Philippe Gilbert, lors de sa victoire en solitaire en 2017. (F. Mons/L'Équipe)
Philippe Gilbert, lors de sa victoire en solitaire en 2017. (F. Mons/L'Équipe)

Voici les 15 éditions du Ronde les plus marquantes depuis la 2e guerre mondiale, que nous avons retenues. À vous de choisir votre préférée en fin d'article.

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14 avril 1946 : Rik Van Steenbergen intronisé premier empereur

On est à la sortie de la Deuxième Guerre mondiale, Rik Van Steenbergen a déjà remporté le Tour des Flandres deux ans plus tôt sous l'occupation allemande, qui fait toujours de lui le plus jeune vainqueur de l'épreuve à l'âge de 19 ans. Cette édition signe le retour des premiers coureurs étrangers, les Néerlandais et les Français notamment. Briek Schotte le grand favori, icône du cyclisme flamand depuis la guerre, est le premier à l'attaque dans le Quaremont puis plus loin dans le Kruisberg. Mais c'est le Français Louis Thiétard qui passe à l'offensive dans le mont d'Edelare. Il est rejoint par l'indéboulonnable Briek Schotte et Rik Van Steenbergen. Déjà réputé pour sa pointe de vitesse, le jeune Belge ne veut prendre aucun risque et décide d'attaquer à cinq kilomètres de l'arrivée. Sa victoire au panache restera l'un de ses plus beaux exploits. Il sera alors intronisé « Rik 1er » par la presse belge et le public.

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1er avril 1951 : Fiorenzo Magni devient le Lion des Flandres

Déjà victorieux des deux éditions précédentes qui avaient mis fin à la domination sans partage des coureurs flamands sur le Tour des Flandres (seul le Suisse Heiri Suter s'était imposé en 1923), Fiorenzo Magni réalise ce jour-là une performance hors-norme qui donnera réellement à l'épreuve ses premières lettres de noblesse hors des frontières belges.

Fiorenzo Magni brise la domination flamande. (L'Équipe)
Fiorenzo Magni brise la domination flamande. (L'Équipe)

Dans des conditions climatiques dantesques, l'Italien s'impose au terme d'une échappée de près de 70 kilomètres et une avance de 5'35'' sur le deuxième, le Français Bernard Gauthier alors que le troisième, Attilio Redolfi, est relégué à plus de 10'30''. Jusqu'à la victoire d'Eddy Merckx en 1969, ça restera l'écart le plus important sur le Ronde entre le vainqueur et le deuxième. Ça lui vaudra aussi d'être surnommé « le Lion des Flandres », un privilège unique pour un étranger.

27 mars 1955 : Louison Bobet, royal en terres flamandes

Ce Tour des Flandres restera longtemps comme l'une des éditions les plus marquantes. Alors que le thermomètre a du mal à passer le cap de zéro degré, une échappée de 14 coureurs - dont l'un des grands favoris Rik Van Steenbergen - prend le large pour atteindre 4 minutes d'avance après 100 kilomètres de course. C'est le Suisse Hugo Koblet et Bernard Gauthier qui lancent la poursuite provoquant le regroupement avant le Mur de Grammont où le Français attaque à nouveau avec dans sa roue son leader Louison Bobet, le champion du monde en titre. Koblet et Van Steenbergen les suivent, les quatre hommes prennent le large et c'est au terme d'un sprint royal que le Breton s'impose pour devenir le premier Français vainqueur du Tour des Flandres.

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La victoire de Louison Bobet. (L'Équipe)
La victoire de Louison Bobet. (L'Équipe)

30 mars 1959 : Rik Van Looy en nouvel empereur

C'est encore un temps exécrable qui accompagne les coureurs tout au long de la journée. Mais c'est aussi les Faema, la fameuse garde rouge de Rik Van Looy, qui rendent la course encore plus difficile, éliminant rapidement deux sérieux adversaires du boss, Noël Foré et Willy Vannitsen. En grand favori, « Rik 2 », l'Empereur d'Herentals est aux commandes dans le Mur de Grammont avec ses deux lieutenants Edgard Sorgeloos et Gilbert Desmet. À 40 kilomètres de l'arrivée à Wetteren, Van Looy attaque en force suivi de Fred De Bruyne alors en fin de carrière. Les deux hommes sont repris avant le final où Desmet attaque. On ne saura jamais s'il joue là sa carte personnelle ou s'il travaille pour son leader, mais Rik Van Looy revient sur son équipier en compagnie de Frans Schoubben et s'impose facilement au sprint pour sa première victoire sur le Ronde.

26 mars 1961 : Tom Simpson premier à jamais

Si Rik Van Looy avec son maillot arc-en-ciel est à nouveau le grand favori après s'être fait piéger par De Cabooter l'année précédente, c'est un vent nouveau qui va souffler sur les monts des Flandres avec la première victoire d'un Britannique, Tom Simpson. C'est à 40 kilomètres de l'arrivée dans le dernier mont pavé de la journée, le Grotenberg, que deux coureurs prennent le large, Tom Simpson et l'Italien Nino Defilippis alors que Van Looy a abandonné sur chute.

Si on n'attendait pas ces deux-là, ils vont pourtant résister avec brio jusqu'au bout dans un sprint inédit sans banderole d'arrivée, arrachée juste avant par les bourrasques de vent. L'Italien portera réclamation jugeant qu'il ne savait pas où se trouvait la ligne d'arrivée mais les commissaires lui rétorqueront qu'il avait bien eu le temps de la visualiser après avoir parcouru les deux tours de circuit précédent.

En bas à droite, Tom Simpson est représenté dans le sprint final. (L'Équipe)
En bas à droite, Tom Simpson est représenté dans le sprint final. (L'Équipe)

5 avril 1964 : Rudi Altig tout en force

Impossible d'oublier ce jour-là, la performance de Rudi Altig, le premier Allemand vainqueur du Tour des Flandres. Formé à l'école de la piste, il en a gardé un sens aigu de la course. Il s'en sert ce jour-là en surfant sur la rivalité qui règne alors chez les Flamands entre les Solo-Superia de Rik Van Looy et Edward Sels et les Flandria de Noel Foré et Willy Bocklant. Rudi Altig profite d'un moment d'atermoiement à 56 kilomètres de l'arrivée pour lancer son offensive. On ne lui donne pas grande chance de terminer alors qu'il reste encore à franchir trois des six monts du programme. Le vent défavorable aurait pu le ramener à la raison, mais le robuste Allemand poursuit son échappée triomphale sans se retourner à une moyenne record de près de 41 km/h. À l'arrivée à Gentbrugge, il relègue le peloton à plus de quatre minutes.

Rudi Altig en 1964. (L'Équipe)
Rudi Altig en 1964. (L'Équipe)

30 mars 1968 : Walter Godefroot à sa main

C'est l'une des éditions les plus disputées avec cette rivalité sans merci entre les trois armadas belges, les Faema d'Eddy Merckx, les Flandria de Walter Godefroot et les Willem II de Rik Van Looy. Mais c'est Raymond Poulidor qui est l'un des premiers protagonistes de la journée après avoir écrémé le peloton dans le Mur de Grammont. Dix-sept coureurs se retrouvent alors en tête parmi lesquels tous les favoris à 50 kilomètres de l'arrivée. L'attaque d'Edouard Sels (vainqueur deux ans auparavant) à dix kilomètres de l'arrivée à Gentbrugge est vouée à l'échec face à Walter Godefroot intenable ce jour-là, qui finit en trombe pour battre au sprint les Altig, Janssen, De Roo mais aussi Merckx et Van Looy. Tout en battant le record de vitesse de l'épreuve (42,44 km/h) détenu par Rudi Altig, quatre ans plus tôt.

Walter Godefroot (à droite), avec Edouard Sels. (L'Équipe)
Walter Godefroot (à droite), avec Edouard Sels. (L'Équipe)

30 mars 1969 : Eddy Merckx, le début de règne

Ce matin-là au départ de Gand noyé sous une chape sombre de giboulées, certains encore doutent des capacités d'Eddy Merckx à dompter le Tour des Flandres. Le Bruxellois a déjà en poche un Paris-Roubaix et trois Milan-San Remo mais ça ne lui suffit pas. Sous son maillot Faema blanc et rouge, il rêve de conquérir ces terres flamandes. Sous une pluie battante et un froid glacial, il ne se pose aucune question comme à son habitude, en se lançant seul à l'assaut des monts flandriens à 70 kilomètres de l'arrivée !

Eddy Merckx en 1969. (L'Équipe)
Eddy Merckx en 1969. (L'Équipe)

Son directeur sportif Guillaume Driessens a beau lui demander de se relever, Eddy Merckx continue sa chevauchée et creuse inlassablement l'écart sur ses rivaux pour finir avec 5'36'' d'avance sur Felice Gimondi, le plus gros écart alors jamais réalisé sur le Tour des Flandres. Cette performance hors-norme, quatre mois avant son premier succès sur le Tour de France, symbolisera plus tard, le début de son règne.

1er avril 1973 : Eric Leman malgré Merckx

Après ses deux victoires en 1970 et 1972, Eric Leman rentre dans l'histoire du Tour des Flandres en rejoignant Achiel Buysse et Fiorenzo Magni les seuls à avoir remporté jusque-là trois fois l'épreuve. Après le maillot Mars-Flandria et celui de Bic, il s'impose cette fois sous les couleurs de Peugeot au terme d'une des éditions les plus haletantes du Ronde, grâce essentiellement à Eddy Merckx toujours en quête d'un deuxième succès après celui de 1969. On le retrouve à l'attaque très tôt dans la journée, provoquant au bout de 70 kilomètres de course une cassure dans le peloton où seule une trentaine de coureurs peut le suivre. Eric Leman isolé, sans aucun équipier de Peugeot à ses côtés, va alors s'efforcer de ne pas lâcher la roue de Merckx, un exploit, que ce soit dans le Quaremont, le Kruisberg puis le Mur de Grammont où le Cannibale est véritablement déchaîné. Eric Leman a tenu bon, il s'impose au sprint face au débutant Freddy Maertens et Eddy Merckx.

30 mars 1980 : Michel Pollentier sort de son rang

Deux ans après son exclusion du Tour de France pour avoir tenté de tricher à un contrôle antidopage en cachant une poire d'urine propre sous son bras, Michel Pollentier est en quête de rédemption. C'est sur un terrain où on n'a pas l'habitude de le voir qu'il crée la surprise ce jour-là alors que le programme du Tour des Flandres comporte pour la première fois de son histoire dix monts à franchir.

C'est dans le Koppenberg qu'il prend la roue de Francesco Moser et Jan Raas, deux des grands favoris. Rejoint un peu plus loin par un groupe de contre dans lequel on retrouve notamment Demeyer, De Vlaeminck, Duclos-Lassalle, Kuiper et Maertens, le trio se reforme dans le Bosberg le dernier mont avant l'arrivée à Meerbeke. Audacieux jusqu'au bout, Michel Pollentier surprend, juste avant la dernière ligne droite Moser et Raas bien plus rapides que lui au sprint et résiste à leur retour.

Michel Pollentier victorieux. (L'Équipe)
Michel Pollentier victorieux. (L'Équipe)

7 avril 1985 : Eric Vanderaerden dans la tourmente

Cette édition du Tour des Flandres se déroule dans des conditions climatiques extrêmes, les pires jamais connues sur l'épreuve selon les anciens ébahis par la performance du jeune Eric Vanderaerden. Sur les 179 coureurs au départ cette année-là de Saint-Nicolas, ils ne seront que 24 à l'arrivée. Sous des trombes d'eau glaciales, le champion de Belgique réalise un exploit qui le fait entrer directement dans la légende à l'image de la victoire de Bernard Hinault à Liège sous la neige en 1980. Aidé par Phil Anderson son coéquipier australien chez Panasonic pour revenir sur Hennie Kuiper après une crevaison au pied du Koppenberg, Eric Vanderaerden s'échappe dans le Mur de Grammont pour finir en solitaire face aux éléments déchaînés les 20 derniers kilomètres. Les mots manquent aux commentateurs ce jour-là pour décrire leur admiration.

5 avril 1987 : Claudy Criquielion au nom des Wallons

L'image qui reste de ce Tour des Flandres n'est pas seulement celle du vainqueur, mais aussi celle d'un malheureux coureur échappé dans le Koppenberg, le Danois Jesper Skibby, victime d'une chute sur ces pentes pavées abruptes qu'une voiture officielle évite de justesse avant de rouler sur son vélo. Cet incident écartera le Koppenberg du parcours du Ronde jusqu'en 2002. Mais on ne peut oublier l'autre héros du jour, plus heureux, Claudy Criquielion le premier Wallon de l'histoire à remporter le Tour des Flandres en 70 éditions. Spécialiste des classiques ardennaises, il crée la surprise en se jouant des spécialistes comme Kelly et Vanderaerden juste après le passage du dernier mont, le Bosberg. Son attaque sur cette portion plane mais ventée jusqu'à l'arrivée à Meerbeke, les prend de court. Il s'impose avec une minute d'avance.

5 avril 1998 : Johan Museeuw nouveau Lion des Flandres

Des trois succès de Johan Museeuw sur le Tour des Flandres après ceux de 1993 et 1995, celui-ci est certainement le plus abouti. En écrivant son nom au Panthéon du Ronde, aux côtés de Buysse, Magni et Leman vainqueurs eux-aussi à trois reprises, Johan Museeuw devient également le plus grand coureur de classiques des années 90 au même titre que Miguel Indurain sur les courses à étapes. C'est dans la côte non-répertoriée de Brakel, à l'endroit même où il avait déjà dessiné ses deux victoires précédentes, qu'il attaque, laissant à distance ses rivaux Peter Van Petegem et Andrei Tchmil. Bien aidé par son armada de la Mapei avec Franco Ballerini et Stefano Zanini, il reste seul à l'avant pendant les 26 derniers kilomètres. Johan Museeuw porté par une ferveur populaire extraordinaire devient le nouveau Lion des Flandres, un titre informel et honorifique affublé jusque-là au seul Fiorenzo Magni.

Johan Museeuw lors de son troisième succès, en 1998. (FABLET/L'Équipe)
Johan Museeuw lors de son troisième succès, en 1998. (FABLET/L'Équipe)

2 avril 2006 : Tom Boonen, la naissance d'un champion

Après sa première victoire l'année précédente, le plus dur était de confirmer son statut de successeur de Johan Museeuw sur les classiques flamandes. Auréolé de son maillot de champion du monde, Tom Boonen fait preuve ce jour-là d'une lucidité digne d'un vieux routier alors qu'il n'a que 25 ans. Toujours à l'affût, il attend son heure durant toute la journée, évitant les pièges comme au Koppenberg où il a le bon réflexe de se positionner en tête de peloton scindé en deux juste derrière lui après une chute massive. Dans l'échappée finale de quinze coureurs où on retrouve notamment Van Petegem, Ballan, Bettini, Hincapie, Cancellara, Hushovd et Zabel, c'est le Belge Leif Hoste qui tente sa chance dans le Valkenberg à 32 kilomètres de l'arrivée. Tom Boonen saute dans sa roue, les deux hommes collaborent parfaitement jusqu'à l'arrivée où Hoste tente sa chance au sprint avant d'être avalé par le champion du monde. Il est le premier depuis Eddy Merckx en 1975 à gagner le Tour des Flandres avec le maillot arc-en-ciel.

Tom Boonen et son maillot de champion du monde. (Jérôme Prévost/L'Équipe)
Tom Boonen et son maillot de champion du monde. (Jérôme Prévost/L'Équipe)

2 avril 2017 : Philippe Gilbert, le coup de folie

Pour sa première saison chez Quick-Step, Philippe Gilbert ne fait pas les choses à moitié. Lui le Wallon spécialiste des classiques ardennaises veut prouver qu'il a aussi sa place sur ces terres flamandes avec son maillot de champion de Belgique sur les épaules. Tout un symbole pour ce défenseur de l'unité du pays souvent menacée par les divisions régionales. Il met tout le monde d'accord en attaquant seul et de loin dans le Vieux-Quaremont, « à la Eddy Merckx » diront certains, à 55 kilomètres du but après s'être concerté avec Tom Boonen qui court là son dernier Tour des Flandres. Malgré le vent de face dans les dix derniers kilomètres vers Audenarde, Philippe Gilbert conserve une petite trentaine de secondes d'avance sur Van Avermaet, Terpstra et Van Baarle alors que Sagan a chuté dans le dernier passage du Quaremont. À 34 ans, il réalise là un exploit de prestige.

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publié le 31 mars 2020 à 09h15 mis à jour le 31 mars 2020 à 09h34
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